Le billet du jour est en quelque sorte une lettre ouverte au Président de la République. Avec léger flash-back pour commencer. Nous sommes en janvier 2008, le locataire de l’Élysée venait d’annoncer la suppression de la publicité après 20 heures sur les chaines publiques. Quelques jours après, dans le cadre de mon travail, je couvre les vœux à la presse du premier secrétaire du Parti Socialiste de l’époque. Pendant la conférence de presse, post discours, je lui pose une question en situant le contexte de l’annonce présidentielle des jours précédents. En quelques mots, quelle est votre vision de la télévision publique dans sa relation avec sa tutelle ? Il me répond en critiquant d’abord l’annonce de Nicolas Sarkozy et entame un plaidoyer pour un service public fort, indépendant avec des moyens à la hauteur de ses ambitions. Un contraste alors avec l’affaiblissement organisé par celui qui avait été élu en 2007. 4 ans plus tard, le premier des socialistes de l’époque devenait à son tour Président de la République. Oui c’était bel et bien François Hollande qui m’avait vanté en quelques mots ce service public fort, indépendant et avec des moyens à la hauteur de ses ambitions. Mais nous y voilà , monsieur le Président. Au delà de quelques augmentations de redevance, où sont les moyens que vous défendiez alors dans l’opposition ? Certes en terme d’indépendance vous avez changé le mode de nomination des PDG de l’audiovisuel public , et c’est bien là que je voulais en venir. La loi qui donne ce pouvoir au CSA a accouché d’un grand moment d’opacité. Pour encourager des patrons du privé , l’anonymat et le secret sont rois. Le grand débat autour de la télévision publique n’aura donc pas lieu. Le projet contre projet est impossible puisqu’on ne connait même pas les candidats encore vraiment en lice. Trouvez vous cela satisfaisant ? Au même moment où dit-on, fort mécontent de l’élimination de Madame Saragosse, vous tenteriez de peser sur le choix des conseillers du CSA. Quel gâchis une fois de plus, quel rendez vous manqué pour France Télévisions. Nous ne connaissons toujours pas la réalité du projet de la tutelle, empêtrée dans des injonctions contradictoires permanentes et encore plus après la remise du rapport de Marc Schwartz. Le chemin de l’ambition c’était son titre, un chemin du renoncement selon moi. Un seul exemple pour illustrer le tout. La ministre Fleur Pellerin , en pleine crise à Radio France, rejetait comme son PDG, l’idée de la fusion des rédactions, nouvelle marotte de la Cour des Comptes. Pas touche au pluralisme disaient en chœur la politique et le dirigeant. Mais en même temps vous laissez, sans répondre à nos alertes, fusionner les rédactions nationales de France 2 et France 3, alors que la question du pluralisme se pose ici tout autant. Alors bien sur, personne ici, et surtout pas moi, n’appelle à l’ingérence , mais une tutelle ça sert à quoi ? Jeudi parait-il le CSA aura fait son choix pour diriger France Télévisions. On connaitra alors peut-être enfin sur quel projet il s’est basé pour désigner. A moins que ce ne soit qu’un casting sur C.V , un concours de beauté , ou pire encore un bras de fer entre vous et le président du CSA. Un combat ridicule et qui pourrez faire une victime de taille , en l’occurrence France Télévisions. Une entreprise déjà bien affaiblie par 10 ans d’errance, par une succession d’erreurs stratégiques, par un dialogue social inexistant, et par des réformes empilées qui n’ont comme résultat aujourd’hui que la fatigue des troupes dans une entreprise véritable usine à burn-out. Mais de tout cela on ne parlera pas , puisque tout ce que je portais tout au long de ma campagne s’est cogné aux vitres opaques des auditions. Mais au delà de ma démarche, le CSA a sans doute fait une grave erreur en n’écoutant pas ce qu’un représentant des salariés pouvait avoir à lui dire sur l’état de l’entreprise aujourd’hui. Même si les candidats auditionnés aujourd’hui et demain ont de beaux projets pour l’avenir de France Télévisions, ils doivent avant tout connaître la réalité de la situation. Le vainqueur de ce faux combat ne pourra pas réussir en sortant de ses cartons une nouvelle réforme sans objectif, sans sens et sans chercher l’adhésion du plus grand nombre. Les salariés en souffrent trop depuis des lustres, mais ça personne ne s’en soucie, pas plus au château, que rue de Valois, où qu’au CSA. Cette parole, je la porte avec d’autres, et nous la porterons au delà d’une nomination d’ores et déjà contestée parce que d’ores et déjà contestable quant au processus qui guide ce choix. Voilà monsieur le Président ce qu’un ex candidat voulait vous écrire. Un ex candidat qui n’est pas un professionnel des candidatures, contrairement à beaucoup d’autres dans cette affaire. Mais vouloir diriger France Télévisions n’est pas juste une ligne de plus qu’on veut ajouter à un CV. C’est une ambition pour nourrir un projet et pas l’inverse. Espérons qu’il ne soit pas déjà trop tard…